Bilan de l'exercice et Perspectives - Interview d'Olivier Miaux, Gérant de VIVESCIA Industries
La chute des activités Boulangerie-Viennoiserie-Pâtisserie et malterie pendant le premier confinement mondial au printemps a entraîné un recul marqué de notre résultat opérationnel. Malgré ce contexte singulier, VIVESCIA Industries, en pleine phase de redressement avant la crise sanitaire, a continué à mettre en œuvre avec beaucoup de rythme et de détermination les chantiers d’amélioration de sa performance économique.
Les indicateurs financiers de VIVESCIA Industries apparaissent aujourd'hui fortement dégradés, quelle est la part de la crise sanitaire ?
100 % de la dégradation de notre performance économique est liée aux effets de la crise sanitaire. La pandémie a eu un impact exceptionnel sur nos hommes et femmes, et sur nos activités. Sans cette crise sanitaire, l’EBITDA de VIVESCIA Industries, en clair sa performance opérationnelle, aurait très certainement progressé de +20 à +25 % sur l’exercice.
Avec les équipes, nous avons engagé des transformations opérationnelles de manière très énergique, dans tous les métiers dès le début de l’exercice.A fin février 2020, la dynamique était bonne et le redressement marqué traduisait les premiers effets du travail accompli, avec 20 millions d’euros de progression de notre EBITDA par rapport à celui de l’exercice précédent. Entre les progrès déjà enregistrés sur les huit premiers mois avec les différents chantiers mis en œuvre et ceux que nous attendions sur le reste de l'année, l’amélioration de la performance pour l'exercice était quasiment acquise au printemps. Nous étions très confiants.
Avec la pandémie mondiale et le confinement généralisé, l’économie du tourisme, des cafés, hôtels et restaurants, des événements sportifs et culturels, qui sont autant d’occasions essentielles de consommation de bière et de produits de restauration à emporter, s’est arrêtée. Les ventes de nos activités Boulangerie-Viennoiserie-Pâtisserie et malterie, fortement exposées aux activités de restauration hors domicile, se sont effondrées sur le troisième quadrimestre, avec une perte de chiffre d’affaires estimée à environ 250 M € principalement visible sur les mois d’avril et mai. Malgré les mesures d’économie mises en place dans tout le Groupe, cette situation a entraîné une chute de près de 25 % de notre EBITDA sur un an. Au total, par rapport à nos prévisions, la Covid-19 a eu un impact d’un peu plus de 100 millions d’euros sur notre résultat net pour moitié en exploitation et l’autre moitié en dépréciations d’actifs incorporels. Il est important de souligner que, malgré ce contexte, nous avons su maîtriser le niveau de notre endettement grâce à la réactivité des équipes,
dès le début de la crise.
Comment vos organisations ont-elles fait face à la situation au plus fort de la crise ?
Je tiens d’abord à souligner la qualité de la gestion de cette crise par nos équipes. C’est une grande source de satisfaction et de fierté.
Nos entreprises ont fait preuve d’une adaptabilité absolument remarquable tant pour préserver la santé de nos collaborateurs que la continuité de nos activités, considérées comme indispensables pour la sécurité alimentaire. Outre les mesures sanitaires, les consignes de prévention et les cellules de gestion de crise dans toutes les entreprises… une grande flexibilité industrielle a dû être mise en place. Pour notre activité Boulangerie-Viennoiserie-Pâtisserie, nous avons décidé par exemple, en accord avec nos clients, de simplifier les gammes de produits pendant la période du confinement. La multiplication des références exige en effet des interactions humaines qui auraient pu être sources de développement de l’épidémie. Nous avons aussi parfois été obligés d’arrêter des lignes de fabrication, de réorienter nos productions d’un site vers un autre ou encore d’allonger les plages horaires de certaines lignes pour répondre à une demande en hausse, comme ce fut le cas pour nos farines Francine. Les équipes ont démontré une très forte agilité et nous avons pu conjuguer, avec un grand professionnalisme,
protection des collaborateurs et continuité de service aux clients et consommateurs.
Enfin, je souhaite saluer la décision de notre filiale ARD qui, dès le début de la crise sanitaire, a décidé de produire des solutions hydro-alcooliques, à titre exceptionnel. Elle a permis de répondre à une partie des besoins urgents de la région du Grand Est au moment où ces produits étaient en pénurie nationale.
Les conséquences de la baisse marquée des volumes sur les activités BVP et malt ont-t-elles pu être limitées au plan financier ?
Notre contre-performance aurait été beaucoup plus marquée si les directeurs des activités n’avaient pas pris des mesures d’économie immédiates. Des efforts ont été réalisés partout. Sans cela, la détérioration de notre performance économique aurait probablement atteint plus de 40 % sur un an. Nous avons gelé toutes les dépenses non indispensables, mis en œuvre des mesures de chômage partiel… Dès février, nous avons opté aussi pour la prudence en matière d’investissements. Nous avons pu économiser près de 20 millions d’euros sur les charges, et autant sur le différé de dépenses d'investissements.
L’activité BVP est très dépendante du dynamisme de la restauration hors domicile… Pensez-vous à des plans de rééquilibrage de ces débouchés ?
L’activité de Restauration hors foyer (RHF) restera, j’en suis convaincu, à moyen et long termes un secteur d’activité très porteur ; il ne faut pas l’abandonner. Nos équipes travaillent à développer toutes les opportunités du secteur. Dans la viennoiserie et le pain, certaines niches connaissent des taux de croissance à deux chiffres. Nous restons également très concentrés sur l’activité retail et les circuits de distribution GMS, pour preuve le succès obtenu à nombreux appels d’offres structurants pour l’avenir. Priorité aussi à l’innovation produits et services dans les mois à venir.
L’activité meunerie évolue sur un marché difficile…
C’est exact. Le marché reste structurellement excédentaire en capacité et à cela s’est ajoutée la crise sanitaire cette année. Dans ce contexte, la bonne résistance des Grands Moulins de Paris est une belle réussite. La performance économique a progressé de plus de 10 % sur l’exercice. La mobilisation des équipes a été exceptionnelle.
Certains marchés connaissent un effritement continu des volumes vendus. Par exemple, le réseau des boulangeries artisanales compte de moins en moins d’acteurs. Cependant, des axes de développement existent. Les Grands Moulins de Paris disposent de nombreux atouts. Nous devons continuer à les exploiter davantage dans les mois et années à venir. Nous sommes aujourd'hui un acteur clé, un jeune centenaire pleinement engagé dans l’animation de la filière française blé-farine-pain. Enfin, Francine est une marque iconique et plébiscitée par les consommateurs français. Il nous revient, en tant qu’acteur de premier plan, d’être toujours plus à l’écoute des clients et de faire preuve d’encore plus d’agilité. Nous travaillons sur des offres beaucoup plus ciblées. Nous accélérons le développement du e-commerce pour les boulangers-artisans. L’innovation est aussi un moteur indispensable. Par exemple, Francine développe des packagings plus appropriés aux attentes et besoins des consommateurs, qui verront le jour dans quelques mois.
Comment se sont comportées les trois autres activités de VIVESCIA Industries dans ce contexte chahuté ?
Nealia, notre entreprise régionale de nutrition animale, Kalizea, qui est le 2e acteur important de la maïsierie européenne, et ARD, spécialisé en recherche et biotechnologies, représentent 10 % du chiffre d'affaires total.
Mais ce sont des activités importantes pour l’animation de notre tissu régional coopératif. Ces trois activités ont très bien résisté et ont toutes dégagé des performances économiques en progression.
Les ventes de Nealia ont progressé de 8 % en volumes, portées par une activité volailles de ponte en forte progression et une activité dynamique des aliments humides liée, entre autres, au développement de la méthanisation. De même, le chiffre d’affaires de Kalizea a connu une belle progression, à plus de 200 000 tonnes, soit +9 %. Enfin, ARD, qui fête ses 30 ans, a enregistré une croissance de près de 10 % de son chiffre d’affaires et réalise pour la première fois un résultat à l’équilibre. Dans ce contexte chahuté avec des marchés volatiles, la dynamique de ces trois activités est un beau succès et une belle récompense pour des équipes très engagées.
Quels seront demain les moteurs de la croissance de VIVESCIA Industries ?
Nos moteurs de performance pour le futur sont liés au poids de nos activités dans le chiffre d’affaires et à la création de valeur générée : aujourd’hui, l’activité BVP, la malterie et, dans une moindre mesure, la meunerie pèsent pour environ 90 % de notre chiffre d’affaires. Lorsque nous serons sortis de la crise sanitaire, grâce aux vastes chantiers de transformation et aux plans d’action d’excellence opérationnelle conduits, nous disposerons de deux moteurs de croissance solides – la malterie et la BVP – et d’un plus petit mais non moins essentiel dans son rôle d'animation de filière, la meunerie. Les autres métiers continueront à apporter leur contribution au développement de VIVESCIA Industries et des territoires du Grand Est.
VIVESCIA Industries a-t-il les moyens financiers de retrouver le chemin d’une croissance rentable ?
Nous avons finalisé cet été le refinancement de VIVESCIA Industries, engagé à l’automne 2019, à hauteur de 660 millions d’euros dont un Prêt garanti par l’État (PGE) de 175 millions d’euros. Ces emprunts bancaires, d’une maturité de 5 ans, exceptionnelle dans les conditions de marché, vont nous permettre d’accompagner le développement de nos activités, ainsi que notre dynamique de reconquête.
Nous devrons être patients, car la crise sanitaire persistante nous a conduits à différer de 18 à 24 mois le calendrier de réalisation du plan de développement et d’efficience élaboré avant la pandémie.
Avec le renforcement du management et le travail audacieux engagé par toutes les équipes depuis 18 mois, nous disposons de leviers d’action qui n’ont jamais été aussi maîtrisés et aussi robustes. Ils nous permettront de sortir renforcés de cette crise sanitaire mondiale.
Le premier trimestre 2020-2021 a vu une reprise plus forte que prévue des volumes vendus de nos activités BVP et malt même si le secteur de la restauration « hors domicile » reste en souffrance. à l’heure où je vous parle, la conjoncture des prochains mois reste très difficile à anticiper et appelle à la plus grande prudence et agilité dans le pilotage opérationnel de nos activités, la gestion de nos investissements et de notre besoin en fonds de roulement.
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